Des microplastiques même dans nos artères

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Une étude a récemment montré que la présence de microplastiques dans la paroi des artères carotides augmentait le risque d’accidents cardiovasculaires. Cette observation inattendue souligne l’urgence de mieux comprendre les impacts sur la santé de cette forme de pollution de plus en plus répandue.

Les plastiques sont des polymères complexes composés d’un squelette moléculaire de carbone provenant d’énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) auquel sont incorporés des dizaines de milliers de composés chimiques qui leur confèrent des propriétés spécifiques, que ce soit en termes de couleur, de stabilité, ou de résistance à l’eau ou au feu.

Les plastiques sont devenus omniprésents dans nos vies et ont radicalement transformé plusieurs aspects de notre société, dans des domaines aussi divers que la médecine, l’aérospatiale, la construction, le sport ou l’emballage des aliments. Cette utilisation à grande échelle du plastique est reflétée par la hausse exponentielle de sa production au cours des dernières décennies, qui est passée de 2 à 460 millions de tonnes produites annuellement de 1950 à 2019.

Et ce n’est pas fini : on prévoit que d’ici 2050, la production de plastique et de ses dérivés pourrait atteindre le milliard de tonnes. (1)

Le plastique est sans doute devenu indispensable, mais cela n’empêche pas que ce matériau possède deux graves défauts :

  1. plusieurs composés chimiques qui entrent dans sa composition sont très toxiques en raison de leurs effets cancérigènes, neurotoxiques ou de perturbation des systèmes endocriniens ;
  2. nous n’avons pas de moyens efficaces d’éliminer le plastique après usage (moins de 10 % sont recyclés).

Avec environ 22 millions de tonnes de déchets plastiques qui s’infiltrent dans l’environnement chaque année, pas étonnant que les scientifiques en aient trouvé des traces un peu partout sur la planète, des profondeurs des océans aux sommets des montagnes les plus élevées.

Les plastiques peuvent aussi se retrouver dans le corps humain sous forme de minuscules particules appelées microplastiques (moins de 5 mm de diamètre) et les nanoplastiques (moins de 1 μm de diamètre). Ces particules proviennent de la dégradation de produits plus gros ou, dans certains cas, de produits cosmétiques et de soins personnels qui contiennent des microbilles.

Dans les deux cas, les microplastiques pénètrent dans l’organisme par ingestion ou par inhalation, par exemple en mangeant de la nourriture contaminée ou qui a été stockée ou chauffée dans des récipients en plastique (les nourrissons peuvent être exposés à des niveaux élevés de microplastiques en ingérant du lait maternisé préparé dans des biberons en propylène). (2)

Mauvais pour le cœur

Une étude italienne indique que la contamination par les microplastiques pourrait avoir des répercussions très négatives sur la santé. (3) Dans des échantillons de plaques d’athérosclérose chirurgicalement excisés des artères carotides de 304 personnes, du plastique a été détecté dans les plaques dans environ la moitié de cette cohorte, avec du polyéthylène dans 150 des échantillons et du polyvinyle chlorure dans 31 d’entre eux. Ces molécules proviennent de particules de plastique, telles que visualisées par l’examen des échantillons par microscopie électronique.

Le principal résultat de l’étude est que la présence de plastique dans les plaques est fortement associée au développement ultérieur de maladie cardiovasculaire : dans les 34 mois après la chirurgie, les chercheurs ont observé que les personnes ayant des microplastiques dans leurs plaques présentaient un risque 4,5 fois plus élevé d’accidents cardiovasculaires (infarctus, accident vasculaire cérébral ou mort cardiaque) par rapport aux patients dont les plaques ne contenaient pas de microplastiques.

Maladies inflammatoires de l’intestin

Il semble aussi que cet effet néfaste des particules de plastique ne soit pas restreint au niveau cardiaque, car une autre étude a montré que les patients souffrant de maladies inflammatoires de l’intestin avaient des concentrations élevées d’au moins 15 types différents de particules de microplastique et que ces taux étaient corrélés avec des formes plus sévères de ces maladies. (4)

Comme le mentionnent des éditoriaux récemment parus dans deux des plus prestigieux journaux de la recherche médicale, le New England Journal of Medicine et Nature Medicine, même si ces études n’ont pas démontré un lien causal entre la présence de particules de plastique et ces maladies, les résultats soulignent néanmoins la nécessité d’accélérer les recherches sur ce sujet.

Une question particulièrement urgente à élucider est de déterminer les quantités de particules absorbées par ingestion, inhalation ou exposition cutanée, les quantités qui s’accumulent dans différents organes au cours de la vie d’une personne, et comment ces particules peuvent affecter la fonction de ces organes.

♦ (1) Landrigan PJ et coll. The Minderoo-Monaco commission on plastics and human health. Ann. Glob. Health 2023; 89 : 23.

♦ (2) Li D et coll. Microplastic release from the degradation of polypropylene feeding bottles during infant formula preparation. Nature Food 2020; 1: 746-754.

♦ (3) Marfella R et coll. Microplastics and nanoplastics in atheromas and cardiovascular events. N. Engl. J. Med. 2024; 390: 900-910.

♦ (4) Yan Z et coll. Analysis of microplastics in human feces reveals a correlation between fecal microplastics and inflammatory bowel disease status. Environ. Sci. Technol. 2022; 56: 414-421.


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